Nous étions à Prague juste avant le réveillon. La ville était encore habillée pour les fêtes de fin d'année et les divers marchés de Noël étaient au rendez-vous. Il y avait dans l'air des parfums de vin chaud, de saucisse et de spécialités tchèques. Il y avait également des hordes de touriste, qui comme nous étaient visiblement contents de visiter cette belle ville et légèrement agacés de devoir la partager avec d'autres personnes.
Mais dans le brouhaha rempli de cette excitation propre aux fêtes de fin d'année , il y avait aussi la forte présence d'un homme qui venait pourtant de disparaître:Vaclav Havel.
Je me suis souvenue du papier que j'avais lu dans Le Monde, quelques semaines auparavant. Un texte qui évoquait son parcours et ses futurs projets de dramaturge.
A proximité des places, des églises et de certains monuments historiques, on trouvait des milliers des bougies, des fleurs, des petits mots, des cadeaux déposés en hommage à l'ancien président.
La surprise c'est que les pragois semblaient vraiment en deuil. Il ne s'agissait pas que des formalités habituelles. Il y avait pour ainsi dire, une atmosphère d'intimité dans l'air, comme si cet homme était proche des gens. Je me suis demandée si pendant toutes ses années à la tête du pays (de 1989 jusqu'à la fin de son mandat en 2003), Havel avait était paternaliste envers ses compatriotes. Je n'ai pas eu de réponse à cette question. Cependant, on connaît la trajectoire politique de Vaclav Havel et son talent littéraire (il fut l'auteur de 19 pièces de théâtre et de plusieurs essais).
On peut se pencher studieusement sur les critiques qui lui ont été faites, analyser rétrospectivement ses fautes et ses réussites, mais apparemment on ne pourra pas lui enlever l'estime profonde des ses concitoyens. J’insiste sur ce point là: ce que l'on voyait un peu partout à Prague ce n'était pas simplement du respect envers la mémoire d'un homme d'état. Les regard croisés étaient tendres et amicaux. C'était en vérité le plus bel hommage, dont je peux témoigner, à un politicien.
Le parallèle entre l'ambiance posthume à Prague et celle des obsèques du dirigeant nord-coréen Kim Jong-Il montre bien l'ampleur des antagonismes de ce bas-monde.
Je n'ose pas en tirer de conclusion, mais je souhaite comme Stéphane Hessel, une insurrection pacifique, une prise de conscience dans ce moment où l'urgence du changement se fait plus pressente que jamais. Peut être était-ce justement là l’honneur de Vaclav Havel, son désir d'humanité. Celui d'en finir avec la tyrannie et la domination.
« N'est-il pas vrai que pour chaque citoyen- et doublement pour les hommes politiques – que l'essentiel est et devrait être finalement que la vie soit plus belle, plus intéressante, plus lumineuse et plus supportable ? » Vaclav Havel (Méditations d’été)